A l’heure du centenaire de la Grande Guerre, l’occasion est trop belle d’explorer un lieu de mémoire en plein réveil. La butte Chalmont, avec ses soldats fantômes de granit rose, est de ceux-là. Immersion photo.

Le monument de la butte Chalmont, érigé en 1935 dans une plaine de l’Aisne, célèbre les soldats britanniques, américains, italiens et français morts lors de la deuxième bataille de la Marne. Durant l’été 1918, c’est à cet endroit stratégique, à 6 km de la ville d’Oulchy-le-Château, qu’ils repoussèrent l’armée allemande. A l’exception des statues, les lieux sont déserts en ce jour de mars 2014, près de cent ans plus tard …

Le père de l’œuvre en question, Paul Landowski, est un sculpteur Franco-polonais (1875-1961). Il s’est retrouvé affecté à une section camouflage pendant la Grande Guerre. La vocation de l’auteur du Christ Rédempteur de Rio de Janeiro lui est venue à 5 ans, lorsque temporairement aveugle après une explosion, il a réalisé son premier modelage dans une mie de pain.

Les sept soldats en granit rose de Bretagne de la Butte Chalmont reviennent d’entre les morts. « Je les relèverai », s’était juré Landowski, alors Poilu, en pensant à ses camarades tombés au champ de bataille. Et le sculpteur perfectionniste de noter, dans son journal de bord du 22 juin 1934: « Il aurait fallu cinq ou six mètres de plus ! ».

Des paliers se succèdent, quatre pour le nombre d’années qu’a duré la Grande Guerre . Les ombres des pins s’étalent sur la pente herbeuse et l’on se croirait en plein été. Le créateur du monument des Fantômes a eu pour credo « Le paysage et la sculpture intimement liés ».

Le site, longtemps considéré comme un simple espace vert a, depuis 1990, connu un regain d’intérêt. Les statues, qui avaient viré au verdâtre à cause du lichen, viennent d’être sablées. La prochaine étape consistera à « poser des pièges » pour éliminer la quarantaine de taupinières jalonnant l’escalier de granit, selon Jean-Pierre Brioux, maire d’Oulchy et instituteur à la retraite.

La Butte-Chalmont a été classée monument historique en 1934… soit un an avant son inauguration officielle : une première en France ! Aujourd’hui, un projet de classement étendu proposé par le Ministère de l’Ecologie, crée la polémique. Il concernerait 9 000 hectares et 17 communes. Aux dernières nouvelles, le conseil municipal a unanimement refusé le projet en raison de contraintes urbaines et économiques lourdes.